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Deux siècles de littérature hagiographique, un film,et un superbe opéra ont perpétué la mémoire des seize « bienheureuses » carmélites de Compiègne.

Soeur Charlotte de la Résurrection, l’une des Carmélites de Compiègne

Parmi les plus célèbres victimes du dramatique conflit survenu entre l’Église catholique et la Révolution dans sa phase radicale, cette affaire, en réalité plus parisienne que locale, est peu représentative de la décennie révolutionnaire à Compiègne.
Fondé en 1641, bénéficiant jusqu’à la Révolution de la protection des reines de France, d’Anne d’Autriche à Marie-Antoinette, le carmel de Compiègne compte 17 membres en 1790. La plupart sont d’origine extérieure et de bonne famille, telle Madame Philippe, fille naturelle du prince de Conti.
En 1790, les religieuses, ayant déclaré vouloir vivre et mourir dans leur Sainte Maison, restent en communauté, élisent une supérieure et une économe et touchent leurs 7243 livres de pension annuelle légale. Après la chute de la monarchie, les carmélites
se réfugient dans trois maisons contiguës près de Saint-Antoine. Elles y maintiennent une vie communautaire paisible et discrète, ayant toutes prêté, le 19 septembre 1792, le serment « Liberté-Égalité » exigé des pensionnés de l’État. Contrairement à ce que dit la légende, il ne sera pas question de serment ni de rétractation à leur procès.
La situation du culte catholique à Compiègne ne se dégrade vraiment qu’à l’automne 1793, suite à l’offensive de déchristianisation impulsée par des éléments extérieurs r

elayée par les autorités locales opportunistes et par les Jacobins de la ville. Ces derniers avaient pourtant fermé longtemps les yeux sur l’agitation fanatique et aristocratique  des religieuses restées en communauté.

Un malheureux concours de circonstances est fatal aux carmélites chez qui l’ont découvre une imprudente correspondance hostile à la Révolution, ce qui étayera la thèse d’un prétendu complot royaliste et fanatique.

Les Carmélites à l’échafaud

L’affaire s’inscrit dans les complexes luttes politiques d’alors : l’agent national Bertrand s’attire les foudres du Comité de salut public pour ses dénonciations vagues contre l’affaiblissement de l’esprit public et du culte de la Raison, que Robespierre veut contrecarrer par celui de l’Être Suprême, contre l’avis du Comité de sûreté générale. L’ordre de perquisition de ce dernier, du 21 juin 1794, est promptement exécuté par le comité révolutionnaire de Compiègne apeuré. Quelques écrits et objets compromettants justifient l’arrestation des seize religieuses et de leur correspondant Mulot, puis leur transfert à Paris.
Leur procès devant le Tribunal révolutionnaire, le 17 juillet 1794, en pleine Grande Terreur de messidor an II, est une sinistre parodie. Les seize Carmélites accusées d’avoir formé des conciliabules de contre-révolution et d’avoir continué à vivre soumises à leur règle et à leur supérieure, sont taxées de fanatisme, le même que Mulot, homme marié, est qualifié de prêtre réfractaire. Tous sont condamnés à mort et aussitôt guillotinés, place du Trône renversé, où leur courage et leur dignité devant la mort impressionnent  vivement la foule.
« On ne saurait croire l’impression de respect que commandait le dévouement de ces généreuses victimes; toutes soupiraient après le moment de leur sacrifice, toutes s’exhortaient a rester fermes et généreuses dans le dernier combat… ; elles avaient l’air d’aller à leurs noces. » (Témoignage d’un employé de la prison).
Leurs corps furent enterrés au cimetière de Picpus dans une fosse commune, où ils se trouvent encore dans le jardin des religieuses. Elles sont béatifiées le 27 mai 1906 par le pape Pie X.

Texte de Jacques Bernet, tiré de l’ouvrage “Mémoire de Compiègne”, ed. J. Marseille

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter ou acheter l’ouvrage suivant :
– “Bulletin n°34 – Les carmélites de Compiègne“, 1995, 281 pages

 

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